Malakoff scène nationale a convié l’auteur Mathieu Simonet à mener un grand projet participatif : Vous êtes ici.
Après plusieurs mois passés à arpenter la ville et récolter des centaines de récits, le projet Vous êtes ici est désormais entre vos mains : redécouvrez Malakoff à travers les yeux et les mots de ses habitant·es.
Cette carte a été réalisée par les étudiant·es du DN MADE Graphisme augmenté – J. Prevert, et les enregistrements sonores par le studio Wave.audio, que nous remercions toutes et tous chaleureusement pour leur participation au projet !
› Consulter ici le recueil.
— en partenariat avec la ville de Malakoff dans le cadre de Malakoff en fête et avec Paris Habitat
— la carte interactive et les affiches ont été réalisées par les étudiant·e·s du DN MADE de graphisme augmenté du lycée Jacques Prévert de Boulogne-Billancourt
— avec le soutien de l’Onda – Office national de diffusion artistique
Rue Caron, à Malakoff, il n’y a pas de commerce.
Pourtant on est tout près du centre, mais la rue Caron ça n’est pas le centre.
La rue est composée de quelques immeubles et surtout de petites maisons individuelles qui disparaissent pour construire du neuf. Parmi les petites maisons qui sont encore là, il en est une vraiment toute petite et assez étrange. Elle intrigue. De temps à autre et de manière complètement aléatoire une petite enseigne s’allume.
Je passe très souvent devant cette maison quand j’emprunte la rue pour aller vers le sud. La plupart du temps les volets sont fermés, la porte aussi, et elle semble abandonnée. C’est une petite maison insignifiante, un peu délabrée il faut dire.
Elle est à un angle, à l’angle de la rue Caron et du passage d’Arcole. S’il n’y avait pas cette enseigne, ce panneau, personne n’y prêterait attention. Une porte fait l’angle, la fenêtre passage d’Arcole a toujours les volets fermés de jour comme de nuit et une autre fenêtre grillagée donne sur la rue Caron. Un petit étage assez moche et c’est tout.
Quand on parle aux gens du quartier, aux voisins, aux anciens de Malakoff de cette maison en nommant le mot qui est inscrit sur l’enseigne, tout le monde la connaît.
Trois lettres rouges en majuscule sur fond blanc, un vieux truc qui reste accroché au mur et qui nous renseignerait sur une activité passée. Le problème, c’est que parfois le néon de l’enseigne s’allume et là on s’interroge.
Trois lettres : un B, un A et un R.
Si on passe par hasard devant quand c’est éclairé un monde curieux se dévoile et on prend alors conscience que la maison est habitée. Mais attention, pas comme un logement, une maison, un ancien commerce reconverti en habitation. Non, non, il semblerait bien que cela soit un bar. On devine un bout de comptoir, quelques tables, deux ou trois à tout casser et des silhouettes. C’est vraiment tout petit quinze à vingt mètres carré à peine.
« Le BAR de la rue Caron », c’est le nom qu’on lui donne, celui par lequel on l’identifie pour en discuter.
Voilà quatorze ans que je vis à Malakoff mais ce « BAR » je n’y suis jamais entrée.
Vous me direz « C’est tout le temps fermé, c’est normal que tu n’y sois pas entrée », « c’est abandonné ! ». Mais ceux qui l’ont déjà vu ouvert savent que ce n’est pas tout à fait exact.
D’ailleurs quand j’en parle autour de moi ça fait tilt : « Ah oui je vois bien, mais moi non plus je n’y suis jamais entré et franchement ça ne me tente pas » ou « C’est bizarre, tu es sûre que c’est vraiment un bar ? », « C’est spécial, c’est privé non ? », « Et puis les horaire ? Y’en a pas ! ».
En tout cas il est encore là « Le BAR de la rue Caron », seuls ceux qui en possèdent les clefs et ceux qui le fréquentent pourraient nous dire si c’en est vraiment un.
Barbara